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Un bébé, une Odyssée...
7 novembre 2010

Comment accoucher naturellement et comment parler du deuil aux enfants? L'importance des mots justes!

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Dans les derniers jours, j'ai eu 3 exemples qui ont illustré l'importance du choix des mots.

1-  Vendredi, je lisais dans le journal La Presse un article intéressant qui parle de l'accouchement à domicile et de l'importance d'ouvrir de nouvelles maisons de naissances au Québec. Une phrase de l'article m'a choquée: "Les 10 sages-femmes de la maison de naissance de Pointe-Claire accouchent quatre patientes par mois chacune". Cherchez le sujet du verbe "accouchent"... bingo, "les sages-femmes"!

Les mots sont importants et cela m'énerve au plus haut point qu'on lise tout le temps partout que c'est quelqu'un d'autre, d'extérieur à la femme (médecin, sage-femme, mari), qui ACCOUCHE!!! Voici un scoop: la seule personne qui accouche ici, c'est la FEMME enceinte, aidée dans cette danse unique par son bébé.

Cette faute de sémantique n'est pas anodine, elle est le reflet de la vision de l'accouchement qu'a notre culture. Je suis persuadée que ces mots ont une influence sur notre inconscient collectif de femme et nous ôtent un pouvoir, celui qui nous est propre et qui est si transcendant: mettre au monde son enfant. J'aurais préféré lire " les sages-femmes assistent chacune 4 femmes lors de leur accouchement".

Un autre mot de l'article m'a fait tilter: "patientes". Ce terme là résonne tout de suite avec "malade" et "souffrante". Or une femme qui donne la vie est tout sauf malade! Je rêve du jour où les accouchements "normaux" (soit plus de 90% des cas) n'auront plus lieu dans des hôpitaux, mais bien dans des maisons de naissance ou à la maison avec des sages-femmes car comme le dit si bien le titre de l'article: "Accoucher n'est pas une pathologie". Je suis persuadée, pour l'avoir vécu, que le simple fait d'être dans un hôpital entrave le processus physiologique de l'accouchement.

J'ai lu un très beau livre (disponible en partie sur google ici), écrit par une sage-femme américaine, le titre était formidable: "Baby Catcher". Elle dit que les médecins et sages-femmes devraient avoir l'humilité de prendre du recul pour laisser la magie de l'accouchement opérer et n'intervenir qu'en cas de problème (ce qui est très rare si on laisse la nature faire et qu'on offre un lieu propice à l'accouchement physiologique = intimité, lumières tamisées, confort, maison ou lieu qui y ressemble, etc). Je l'ai déjà écrit ici, mais c'est important: lors de l'accouchement ce sont exactement les mêmes hormones (ocytocine, etc.) qui sont en oeuvre que lorsqu'on fait l'amour. Seriez-vous à l'aise pour faire cela dans une chambre d'hôpital avec des infirmières présentes, des machines qui monitorent le tout, etc? Pour l'amour, nous n'avons pas besoin de "cours", d'un médecin pour nous dire comment respirer ou se positionner. On le sait, on le sent, ça coule de source, c'est tout. Pour que les mêmes hormones fassent leur travail comme il faut et avoir un accouchement naturel, il est donc essentiel d'avoir une intimité aussi proche que possible de celle nécessaire au début de toute cette aventure: l'amour...

Bien sûr, en cas de problème, un transfert à l'hopital est de mise et les gynécologues et obstétriciens, les experts, sont extraordinaires et nécessaires dans ces cas là. Mais je suis convaincue qu'ils ne devraient pas être la première ligne. Il faut changer notre façon de voir l'accouchement, se réapproprier notre pouvoir de femmes, reprendre confiance en nos corps et nos bébés qui "savent" intuitivement et instinctivement comment faire si on leur donne la chance. Dans chaque quartier il devrait y avoir une maison de naissance, tout comme il y a une école et une épicerie. Avec d'autres citoyennes de mon quartier, on se se mobilise pour l'ouverture d'une maison de naissance à Pointe-St-Charles. Celles-ci sont toujours nées d'initiatives citoyennes, espérons que notre souhait prendra vie.

2-  Samedi, nous avons invité nos anciens voisins et nos nouveaux locataires à souper. Eh oui, un proverbe flamand dit "better goeie buren dan verre vrienden" (mieux vaut de bons voisins que des amis lointains) et nous avons toujours tenu à cultiver de bonnes relations avec nos voisins. Nos locataires avaient dit qu'ils apporteraient de la tarte aux pommes. Et moi de dire : "Julie, merci pour la tarte elle à l'air délicieuse!". Julie de répondre: "euh, c'est que je n'ai rien fait du tout, c'est François qui l'a faite de A à Z, il m'a chassé de le cuisine car je ne coupais pas les pommes comme il fallait, c'était pas assez droit!". Vous voyez, j'ai vu une tarte et j'ai immédiatement pensé que c'était la "femme" qui l'avait faite. Pas une seconde je me suis dit que cela pouvait être François... Comme c'est lointain ancré en nous ce concept de femme aux fourneaux!

3-  Dimanche, j'ai lu un autre article de La Presse: "Le grand deuil des tout-petits". Je vous invite à le lire, c'est vraiment très  touchant. On y parle de la façon dont les enfants vivent et perçoive la mort d'un parent. Ce qui m'a frappé, et c'est le lien entre mes trois exemples d'aujourd'hui, c'est l'importance de choisir les bons mots, a fortiori lorsqu'un événement aussi dramatique frappe un enfant. Voici un extrait de l'article: "Je vois des mamans dire à leurs petites filles que leurs papas sont maintenant des étoiles (ou au ciel). Ça a des répercussions, c'est certain, puisque les enfants prennent ce qu'on leur dit au pied de la lettre. Pour une fillette de 4 ans, «ton papa est sur une étoile», ça veut dire qu'il a fait ses bagages pour aller vivre ailleurs, qu'il l'a abandonnée. J'ai vu des enfants revenir de Walt Disney très fâchés contre leur famille, parce qu'ils avaient compris, dans l'avion, que ce n'est pas vrai qu'on vit au ciel, qu'il n'y a pas de maison sur les nuages. J'en ai vu d'autres à qui l'on a dit que papa s'était «endormi pour toujours». Ils ne voulaient plus se coucher le soir et se réveillaient la nuit pour aller voir si leur maman pouvait se réveiller aussi. Si on ne leur explique pas qu'il s'agit simplement de croyances, que ça nous fait du bien d'imaginer ces choses, ils peuvent perdre confiance en nous. (...) Ce qu'il faut dire aux enfants qui perdent un parent ou un proche? Il faut permettre à l'enfant d'arrêter d'attendre leur retour. Il faut lui expliquer que la mort, c'est l'arrêt du fonctionnement du corps, que les yeux ne voient plus, les oreilles n'entendent plus, les cheveux ne poussent plus. C'est aussi pour cela que les rites funéraires sont un facteur de protection énorme: quand un jeune peut voir et toucher la mort, il réalise qu'elle n'est pas comme la vie".

Et voilà, la boucle est bouclée, j'ai parlé de la naissance, de tartes aux pommes et de la mort! J'espère avoir trouvé les mots justes...

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Commentaires
L
J'ai trouvé très justes les 3 parties de votre écrit. Je suis infirmière puéricultrice et je trouve vraiment dommage que notre société dépossède les femmes de la Maternité. Le personnel soignant ne devrait pas être en première ligne, c'est clair.<br /> <br /> La 2ème partie m'a fait sourire(jaune!) car même nous les femmes, nous n'arrivons pas forcément à sortir du carcan dans lequel on nous a emprisonné depuis des millénaires et dans toutes les cultures!<br /> <br /> Pour la 3ème partie, le choix des mots est extrêmement important et il est vrai que les enfants prennent ce qu'on leur dit au pied de la lettre, ils n'ont pas le recul nécessaire pour comprendre le second degré. Et même entre adulte, les mots peuvent blesser et faire autant de mal voire plus que les coups. <br /> <br /> Bravo pour votre écrit<br /> <br /> belle journée<br /> <br /> Audrey
L
Coudonc, lui aussi, je l'avais loupé! Les mots justes, oui, comme toujours. Des mots forts qui font réfléchir, des mots francs qui nous ramènent à l'essentiel.
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